Un incendie s’est déclaré jeudi 20 novembre sur le site de la COP30 à Belém, provoquant l’évacuation d’urgence de la Zone Bleue à la veille de la clôture des négociations. Si le sinistre a été maîtrisé sans faire de victimes graves, treize personnes ont été traitées pour inhalation de fumée et les discussions cruciales sur le climat ont été brutalement interrompues.
Une colonne de fumée noire s’élevant au-dessus des structures temporaires de la conférence, en plein cœur de l’Amazonie brésilienne. C’est l’image saisissante qui a circulé en boucle sur les réseaux sociaux ce jeudi après-midi, marquant un tournant dramatique pour cette trentième conférence de l’ONU sur le climat.
Alors que les délégués de près de 200 pays tentaient de sceller un accord financier historique, des cris d’alerte ont résonné dans les allées des pavillons nationaux.
La panique s’est emparée des lieux lorsque les systèmes d’alarme ont retenti peu après 14h00, heure locale.
Scènes de chaos dans la Zone Bleue
Selon les témoins présents sur place, l’incendie a démarré de manière soudaine, dégageant immédiatement une épaisse fumée acre qui a envahi l’espace confiné des chapiteaux.
Les agents de sécurité de l’ONU, appuyés par les forces brésiliennes, ont dû hurler des consignes pour diriger la foule vers les issues de secours.
Viliami Vainga Tone, délégué des Tonga, a décrit à l’Associated Press une scène de confusion totale alors qu’il sortait d’une réunion ministérielle de haut niveau.
Il raconte avoir vu des dizaines de personnes débouler en courant, bousculant tout sur leur passage, alors que l’air devenait rapidement irrespirable.
L’évacuation, bien que tendue, s’est déroulée sans mouvement de foule meurtrier, une prouesse compte tenu des milliers de personnes présentes sur le site.
Les pompiers de l’État du Pará sont intervenus en moins de dix minutes, déployant des lances à incendie à travers les couloirs déserts jonchés d’affaires abandonnées.
L’hypothèse du chargeur de téléphone
L’origine du sinistre fait l’objet de spéculations, mais les autorités brésiliennes privilégient pour l’instant la piste accidentelle.
Le ministre brésilien du Tourisme, Celso Sabino, présent sur les lieux, a évoqué une cause triviale aux conséquences potentiellement désastreuses.
Selon ses déclarations à la presse locale, un simple téléphone portable laissé en charge pourrait être à l’origine d’un court-circuit dans l’un des stands.
Il a précisé avoir vu des images montrant le départ de feu au niveau d’une régie électrique, possiblement surchargée par les équipements des délégations.
Des sources contradictoires ont d’abord situé l’incendie près du pavillon de la Chine, tandis que d’autres témoins évoquaient la zone des pavillons africains, non loin du stand du Sénégal.
Quelle que soit l’origine exacte, la rapidité de propagation des flammes pose de lourdes questions sur la sécurité des structures temporaires érigées pour l’événement.
Un bilan humain miraculeux
Malgré la virulence des flammes, le bilan reste heureusement léger sur le plan médical.
L’ONU Climat (CCNUCC) a confirmé dans la soirée que treize personnes avaient dû recevoir des soins médicaux pour des intoxications légères liées aux fumées.
Aucun brûlé grave n’est à déplorer, un soulagement pour les organisateurs qui craignaient le pire dans cet environnement dense.
Le ministre Sabino a tenu à rassurer la communauté internationale en affirmant que les dégâts matériels étaient « limités » à une petite section des pavillons.
Il a insisté sur le fait que la structure principale n’était pas compromise, bien que l’odeur persistante de plastique brûlé continue de flotter sur le site.
Négociations à l’arrêt : le temps presse
Si les vies sont sauves, c’est le calendrier diplomatique qui se retrouve en soins intensifs.
L’incendie a forcé la suspension totale des négociations pendant près de sept heures, une éternité dans la dernière ligne droite d’une COP.
Le site est resté fermé jusqu’à tard dans la soirée pour permettre aux experts en sécurité de vérifier l’intégrité des installations électriques.
Cette interruption survient au pire moment possible, alors que les tensions étaient déjà vives entre les pays du Nord et du Sud sur la question des financements.
Claudio Angelo, de l’Observatoire du Clima, n’a pas caché son inquiétude face à ce contretemps inédit dans l’histoire des conférences climatiques.
Il souligne que jamais, en trente ans de conventions climat, une « Zone Bleue » (l’espace diplomatique sacré) n’avait pris feu, y voyant un symbole troublant de la fragilité de nos systèmes.
La sécurité de Belém en question
Cet incident remet en lumière les défis logistiques immenses relevés par la ville de Belém pour accueillir cet événement planétaire.
Organiser une conférence de cette ampleur au cœur de l’Amazonie, dans des infrastructures en partie provisoires, comportait des risques identifiés dès le départ.
La chaleur tropicale et l’humidité saturante mettent à rude épreuve les installations électriques temporaires, souvent sollicitées au maximum de leurs capacités.
Les critiques n’ont pas tardé à fuser sur la qualité des matériaux utilisés pour les cloisons des stands, apparemment très inflammables.
Toutefois, Celso Sabino a balayé les critiques visant spécifiquement l’organisation brésilienne.
Il a martelé que ce type d’incident « aurait pu arriver n’importe où dans le monde », refusant que l’image de Belém soit ternie par cet accident.
Une reprise sous haute tension
La réouverture du site a finalement été autorisée vers 20h40, permettant aux négociateurs épuisés de regagner leurs salles de réunion.
L’atmosphère était cependant lourde, certains délégués découvrant leurs espaces de travail inaccessibles ou endommagés par l’eau des pompiers.
Le secrétariat de l’ONU a dû réorganiser en urgence le planning des sessions plénières, qui se tiendront désormais vendredi matin.
La pression est maximale : il reste officiellement moins de 24 heures pour aboutir à un texte final, alors que les divergences restent profondes.
Cet incendie, aussi spectaculaire soit-il, ne doit pas devenir l’écran de fumée masquant l’échec ou la réussite des pourparlers climatiques.
Comme l’a résumé un observateur en quittant les lieux : « La maison brûle littéralement, espérons que cela serve d’électrochoc aux négociateurs. »
