C’est un séisme politique qui secoue Jérusalem ce dimanche. Le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a officiellement déposé une demande de grâce auprès du président Isaac Herzog, affirmant que son procès pour corruption « déchire le pays » et entrave sa capacité à diriger l’État en pleine crise régionale.
Le coup de poker du « Roi Bibi »
C’est une manœuvre que tout Israël redoutait ou espérait, mais que personne n’attendait aussi brutalement.
Dans une déclaration vidéo diffusée ce dimanche 30 novembre, Benyamin Nétanyahou apparaît grave, presque solennel. Il ne demande pas la pitié, mais invoque la « réconciliation nationale ».
Selon les informations confirmées par le bureau de la présidence, la requête comprend deux documents explosifs : une lettre personnelle du Premier ministre et un dossier juridique de 111 pages rédigé par son avocat, Me Amit Hadad.
Sans aveu de culpabilité
Le détail qui change tout réside dans la formulation de la demande.
Contrairement aux usages, Nétanyahou refuse catégoriquement d’admettre la moindre culpabilité. Il maintient son innocence dans les dossiers « 1000 », « 2000 » et « 4000 » (fraude, corruption, abus de confiance).
Son argumentaire repose sur une logique d’efficacité :
- Le procès dure depuis près de six ans.
- L’obligation de témoigner trois fois par semaine est qualifiée d’« exigence impossible » pour un chef d’État en exercice.
- L’arrêt des poursuites serait, selon lui, le seul moyen d’apaiser les tensions civiles.
L’ombre de Donald Trump
Cette demande intervient dans un contexte diplomatique brûlant.
Comme le rapportent plusieurs médias internationaux, dont l’agence AP, le président américain Donald Trump a personnellement pesé dans la balance. Dans une lettre adressée à Isaac Herzog plus tôt ce mois-ci, le locataire de la Maison-Blanche a qualifié le procès de « politique » et « injustifié », exhortant son homologue israélien à clore ce chapitre.
Cette ingérence directe de Washington pourrait forcer la main au président Herzog, bien que son rôle soit constitutionnellement apolitique.
L’opposition crie au scandale
La réaction de la classe politique israélienne a été immédiate et volcanique.
Le chef de l’opposition, Yair Lapid, a fermement rejeté l’idée même d’une grâce sans reddition judiciaire. « On ne peut pas gracier un homme qui ne reconnaît pas ses torts et qui refuse de quitter la vie politique », a-t-il martelé, dénonçant une atteinte gravissime à l’État de droit.
Pour les détracteurs du Premier ministre, cette démarche confirme que Nétanyahou place sa survie personnelle au-dessus des institutions démocratiques.
Un dilemme historique pour Herzog
La balle est désormais dans le camp du président Isaac Herzog.
Son bureau a qualifié la requête d’« exceptionnelle » aux conséquences « significatives ». La procédure standard a été enclenchée : le dossier a été transmis au ministère de la Justice pour avis consultatif.
Israël retient son souffle : accepter cette grâce pourrait pacifier une rue divisée, mais risquerait de briser définitivement la confiance dans l’indépendance de la justice.
