Avec un record de 628 millions d’euros de fraudes détectées en 2024, l’Assurance maladie renforce ses moyens de contrôle et plaide pour une meilleure coordination avec les complémentaires santé, malgré les obstacles juridiques rencontrés.
Des résultats inédits dans la lutte anti-fraude
Une hausse spectaculaire des fraudes identifiées
En 2024, les dispositifs de détection mis en place par la Caisse nationale de l’Assurance maladie (Cnam) ont permis de mettre au jour un montant sans précédent de fraudes : 628 millions d’euros. Cette progression de plus de 34 % par rapport à 2023 s’explique par le renforcement des contrôles et une vigilance accrue face aux fraudes de plus en plus élaborées.
Professionnels de santé : une part minoritaire des cas, mais un préjudice majeur
Si plus de la moitié des affaires recensées impliquent des assurés, ces cas ne représentent que 18 % des montants fraudés. À l’inverse, les professionnels de santé sont responsables de 26 % des cas, mais concentrent près des deux tiers du préjudice financier (62 %). Ce déséquilibre souligne la nécessité de cibler les pratiques abusives dans le secteur médical.
Vers une coopération entre régimes obligatoires et complémentaires
Une proposition de partage d’informations sensibles
Pour gagner en efficacité, la Cnam défend un projet de coopération renforcée entre les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) et les organismes complémentaires (mutuelles, assurances). Le principe : faciliter le partage d’informations en cas de suspicion de fraude, afin de permettre une réaction coordonnée et rapide, tout en respectant la confidentialité des données médicales.
Une mesure censurée, non sur le fond mais sur la forme
Inscrite à l’origine dans l’article 49 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2025, cette disposition a été invalidée par le Conseil constitutionnel en février. Motif : elle ne relevait pas directement du champ budgétaire et constituait donc un « cavalier social ». Cette décision ne remet pas en cause la légitimité du dispositif, mais uniquement son encadrement procédural.
Un nouveau véhicule législatif pour contourner l’obstacle
Une relance parlementaire indépendante du budget
Pour contourner l’avis du Conseil, le député Cyrille Isaac-Sibille (Modem) a présenté en mai 2025 une proposition de loi reprenant les dispositions censurées. Ce texte prévoit notamment que, lorsqu’une fraude est signalée au procureur, les complémentaires puissent être informées de l’identité de l’auteur présumé pour mieux coordonner leurs actions.
Des garanties pour encadrer les échanges d’informations
Le projet encadre strictement les données partagées, excluant tout élément relevant du secret médical. Les fédérations de complémentaires (Mutualité Française, France Assureurs, CTIP) soutiennent la démarche, mais demandent une base légale claire afin de sécuriser juridiquement l’usage des données en question.
Des perspectives conditionnées par la sécurité juridique
- Fraude estimée globale : environ 4 milliards d’euros, selon la Cour des comptes.
- Part des fraudes stoppées en 2024 : 628 millions d’euros, soit 15 à 16 % du total estimé.
- Évolution législative en cours : une proposition de loi autonome, hors du cadre budgétaire, est actuellement examinée à l’Assemblée nationale.
Une coopération jugée essentielle par les acteurs du secteur
La lutte contre la fraude nécessite une approche globale impliquant à la fois l’Assurance maladie obligatoire (AMO) et les complémentaires santé (AMC). Face à la sophistication croissante des fraudes, cette synergie est perçue comme un levier indispensable pour sécuriser les fonds publics et privés sans porter atteinte à la protection des données personnelles.