L’influenceur a brutalement quitté son audition parlementaire en direct, créant un incident inédit à l’Assemblée nationale.
Les 5 informations clés de l’incident :
- Alex Hitchens a quitté prématurément son audition devant la commission d’enquête TikTok ce mardi 10 juin 2025
- L’échange avec Arthur Delaporte, président de la commission, a dégénéré autour de propos sur la sécurité des femmes
- L’influenceur risque jusqu’à 2 ans de prison et 7500 euros d’amende pour abandon d’audition sans autorisation
- Cette commission auditionne les influenceurs jugés problématiques par 32 000 lycéens lors d’une consultation citoyenne
- L’incident révèle les tensions autour du contrôle parlementaire des contenus TikTok destinés aux mineurs
L’incident qui secoue l’Assemblée nationale
Ce mardi 10 juin 2025 restera gravé dans les annales parlementaires. Vers 16h24, Alex Hitchens, a créé un précédent en quittant brutalement son audition devant la commission d’enquête sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs. Mais qu’est-ce qui a pu pousser cet influenceur autoproclamé « coach en séduction » à claquer virtuellement la porte de l’Assemblée nationale ?
L’audition, menée en visioconférence depuis Dubaï où réside l’influenceur, était censée durer 45 minutes. Elle n’en aura duré qu’une quinzaine avant de tourner au clash. Arthur Delaporte, député socialiste du Calvados et président de la commission, s’est retrouvé face à une situation inédite lorsque son interlocuteur a soudainement coupé la connexion.
La tension est montée progressivement autour d’extraits de contenus diffusés par Alex Hitchens sur TikTok. L’influenceur, qui revendique 26 ans et une expertise en « séduction masculine », s’est senti attaqué sur des propos qu’il juge sortis de leur contexte.
Ce qui a déclenché l’esclandre
La controverse a éclaté autour d’une déclaration d’Alex Hitchens concernant la sécurité des femmes. Selon les témoignages de l’audition, l’influenceur avait expliqué : « Je veux parler du fait que dans ce monde, dans ce monde qui est dur, que fait une femme dehors après vingt-deux heures ? Et je poursuivais ensuite : ‘il est préférable de sortir avec une amie ou avec deux amis ou avec un homme’. »
Arthur Delaporte a alors confronté l’influenceur à d’autres extraits, notamment cette phrase : « Prenez son téléphone si elle refuse, c’est une pute, fin de relation ». Cette confrontation directe a visiblement agacé Alex Hitchens, qui a reproché au président de la commission de « déformer ses propos » et de lui « balancer à la gueule » des extraits isolés.
Les protagonistes de cette audition exceptionnelle
Qui est vraiment Alex Hitchens ?
Derrière le pseudonyme inspiré du film « Hitch » avec Will Smith se cache Isaac Mayembo, né le 4 janvier 1999 à Évry. Avant de devenir influenceur, ce Français d’origine congolaise était basketteur professionnel, ayant évolué chez les Sharks d’Antibes et participé à un stage avec l’équipe de France U20 en 2019.
Mais que révèle vraiment son parcours sur les réseaux sociaux ? L’influenceur s’est spécialisé dans le « coaching en séduction » masculine, un contenu qui suscite de nombreuses polémiques. Ses vidéos, vues par des millions de jeunes, prônent des techniques de drague parfois controversées et véhiculent une vision de la masculinité qui inquiète les spécialistes.
Le 10 juin 2025, lors de son audition, il a même déclaré qu’il « faut interdire TikTok parce que cette plateforme est néfaste » et que « c’est les contenus qui choquent qui marchent ». Un paradoxe saisissant pour quelqu’un qui a bâti sa notoriété sur cette même plateforme.
Arthur Delaporte, le député qui veut réguler TikTok
Face à lui, Arthur Delaporte incarne la volonté parlementaire de réguler les réseaux sociaux. Ce député socialiste de 40 ans, élu du Calvados, préside depuis mars 2025 cette commission d’enquête créée à l’unanimité par l’Assemblée nationale.
Pourquoi cette mission lui tient-elle tant à cœur ? Arthur Delaporte s’est spécialisé dans la lutte contre les dérives des influenceurs depuis 2022, co-rédigeant avec Stéphane Vojetta la loi du 9 juin 2023 encadrant le marketing d’influence. Il dénonce régulièrement TikTok comme une « machine à sous de dopamine » qui expose les adolescents à des contenus dangereux.
Le député dénonce notamment que TikTok peut exposer des adolescents à des « vidéos qui apprennent à se scarifier, ou à se mutiler, sans éveiller de soupçons ». Son combat s’enracine dans une préoccupation profonde pour la protection des mineurs face aux algorithmes de recommandation.
Pourquoi ces influenceurs ont-ils été convoqués ?
La sélection des influenceurs auditionnés ne doit rien au hasard. Elle résulte d’une « grande consultation citoyenne où 32 000 personnes, dont une majorité de lycéens, se sont prononcées sur les créateurs de contenus français considérés comme les plus problématiques ».
Mais qui sont ces autres figures controversées ? Nasdas (Nasser Sari), 28 ans, affiche 3,7 millions d’abonnés sur TikTok et 9,2 millions sur Snapchat, en faisant le deuxième influenceur le plus suivi de France. AD Laurent et Hugo Décrypte complètent cette liste d’influenceurs scrutés pour leur impact sur la jeunesse.
Cette consultation révèle l’ampleur des préoccupations des jeunes eux-mêmes face à certains contenus. Comment expliquer que des lycéens désignent spontanément ces créateurs comme problématiques ?
Les enjeux juridiques derrière l’incident
Ce que risque Alex Hitchens
L’abandon d’audition sans autorisation n’est pas un simple incident protocolaire. Selon l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, « la personne qui ne comparaît pas ou refuse de déposer ou de prêter serment devant une commission d’enquête est passible de deux ans d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende ».
Cette sanction s’applique-t-elle au cas d’Alex Hitchens ? Juridiquement, quitter une audition en cours sans autorisation du président de commission peut être assimilé à un refus de déposer. Les poursuites seraient alors « exercées à la requête du président de la commission ou, lorsque le rapport de la commission a été publié, à la requête du bureau de l’assemblée intéressée ».
L’Assemblée nationale se trouve donc face à un dilemme : sanctionner cet acte inédit ou tenter une nouvelle convocation ? Arthur Delaporte a d’ailleurs immédiatement précisé qu’il fallait « recontacter Monsieur Hitchens pour l’informer qu’on ne peut pas quitter une audition sans qu’on lui ait suggéré ».
Les pouvoirs étendus des commissions d’enquête
Pourquoi les commissions d’enquête disposent-elles de tels pouvoirs ? Depuis la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, les commissions d’enquête font l’objet de l’article 51-2 de la Constitution et disposent de prérogatives étendues pour « recueillir des éléments d’information ».
Ces commissions bénéficient d’un « droit de citation directe » : les personnes convoquées « sont tenues de déférer à la convocation qui leur est délivrée, si besoin est, par un huissier ou un agent de la force publique ». Un arsenal juridique qui confère aux parlementaires des moyens d’investigation comparables à ceux de la justice.
Mais quelles sont les limites de ces pouvoirs ? La Cour européenne des droits de l’homme a soulevé des questions sur « le droit de se taire et celui de ne pas contribuer à sa propre incrimination » dans le cadre des auditions parlementaires, créant un débat juridique complexe.
Les révélations sur l’impact de TikTok
Pourquoi cette commission compte-t-elle ?
L’incident Alex Hitchens ne doit pas masquer l’enjeu fondamental de cette commission. Créée le 13 mars 2025, elle est chargée d’étudier « les dispositifs de captation de l’attention utilisés par TikTok ainsi que leurs effets psychologiques, notamment en termes de pensées et de comportements suicidaires ».
Selon une étude citée par Laure Miller, rapporteure de la commission, « comparativement à des profils standards, les utilisateurs manifestant un intérêt pour les questions de santé mentale peuvent se voir proposer dans leur fil douze fois plus de vidéos traitant du suicide ».
Ces chiffres révèlent l’ampleur du défi. Comment une plateforme utilisée quotidiennement par 40% des 16-25 ans peut-elle influencer leur santé mentale ? L’application est accusée de provoquer « troubles du sommeil, de l’attention, sédentarité excessive, risques de dépression, d’anxiété, allant jusqu’à développer chez certains adolescents des pensées suicidaires ».
Les données économiques qui interpellent
Mais quels sont les véritables enjeux économiques derrière TikTok ? Arthur Delaporte dénonce notamment « les cadeaux que les utilisateurs peuvent donner aux créateurs de contenus en live » qui « pourraient être assimilables à des jeux d’argent déguisés ».
Cette économie de l’attention génère des revenus considérables. Les influenceurs comme Alex Hitchens monétisent leur audience à travers des formations, du coaching payant et des partenariats. Une économie parallèle qui échappe largement au contrôle des pouvoirs publics.
La commission étudie également les différences entre TikTok et sa version chinoise Douyin, où « des mesures strictes pour les mineurs et une priorisation de contenus éducatifs et culturels » sont appliquées. Pourquoi cette différence de traitement entre les jeunes Chinois et les autres ?
Ce que révèle cet incident sur notre société
Les questions que vous vous posez
Peut-on vraiment réguler les influenceurs ? Cette question traverse toute l’audition ratée d’Alex Hitchens. Arthur Delaporte souhaite « que l’on soit confronté aux TikTokers pour savoir dans quelles mesures ils agissent » et comprendre « s’ils ont conscience de leur impact sur les mineurs ».
Quelle autorité peut s’exercer sur des créateurs basés à l’étranger ? Alex Hitchens réside à Dubaï, illustrant la complexité de la régulation dans un monde numérique sans frontières. Comment les lois françaises peuvent-elles s’appliquer à des influenceurs expatriés ?
Les jeunes sont-ils vraiment en danger ? Onze familles ont déjà porté plainte contre TikTok en France, estimant que « l’algorithme du réseau social a poussé leurs enfants au suicide ». Ces témoignages dramatiques alimentent l’urgence parlementaire.
L’influence des algorithmes sous surveillance
Comment TikTok capte-t-il l’attention des mineurs ? Selon une étude d’Amnesty International France, l’application crée une « spirale de contenus toxiques pour les jeunes » grâce à son « algorithme de recommandation qui a pour objectif d’inciter les utilisateurs à passer toujours plus de temps sur la plateforme ».
Cette mécanique addictive interroge notre rapport aux écrans. Pourquoi acceptons-nous qu’une entreprise privée programme l’attention de nos adolescents ? L’incident Alex Hitchens révèle paradoxalement l’ampleur de ces enjeux : même celui qui dénonce TikTok en a fait sa source de revenus.
La commission prévoit un déplacement à Bruxelles le 4 juin et maintient « la consultation citoyenne en ligne ouverte jusqu’au 31 mai 2025 », témoignant de la dimension européenne de ces préoccupations.
Perspectives et suite des événements
Un incident révélateur des tensions
L’esclandre d’Alex Hitchens crystallise les tensions autour de la régulation numérique. D’un côté, des parlementaires déterminés à protéger les mineurs. De l’autre, des influenceurs qui revendiquent leur liberté d’expression et dénoncent une forme de censure.
Mais que peut-on attendre de cette commission ? Les objectifs incluent « une vérification de l’âge plus poussée, ou d’interdire un certain contenu pour une certaine tranche d’âge ». Des mesures concrètes qui pourraient transformer l’écosystème TikTok français.
Le rapport final de la commission est attendu avant le 12 septembre 2025. Il pourrait recommander des sanctions contre TikTok ou proposer un encadrement plus strict des influenceurs. L’incident Alex Hitchens renforce paradoxalement l’urgence de ces travaux.
L’avenir de la régulation numérique
Cet épisode s’inscrit dans un mouvement global de régulation des plateformes. Aux États-Unis, TikTok a failli être interdite en janvier 2025. En Europe, le Digital Services Act impose déjà de nouvelles obligations aux réseaux sociaux.
La France pourrait-elle aller plus loin ? L’audition manquée d’Alex Hitchens montre les limites de l’approche parlementaire face à des acteurs qui se jouent des frontières. Faudra-t-il imaginer de nouveaux outils de régulation pour l’ère numérique ?
Une chose est certaine : l’incident du 10 juin 2025 marquera l’histoire de la régulation des réseaux sociaux en France. Alex Hitchens voulait éviter les questions dérangeantes. Il vient paradoxalement de braquer tous les projecteurs sur les dérives qu’il incarne.