Dans la nuit de vendredi à samedi, l’Assemblée nationale a adopté de justesse un amendement qui réforme en profondeur l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) pour le remplacer par un « impôt sur la fortune improductive ». Ce vote, acquis par 163 voix contre 150, a été rendu possible par une coalition politique inattendue, créant de vives tensions au sein de l’hémicycle.
Les contours du nouvel impôt sur les biens « improductifs »
Porté par le député MoDem Jean-Paul Matteï, cet amendement vise à élargir l’assiette de l’actuel IFI. Le nouveau dispositif prévoit de taxer les « actifs improductifs » qui n’étaient pas concernés jusqu’à présent.
La liste inclut les biens immobiliers non loués, mais aussi certains biens meubles comme les yachts, les jets privés, les voitures de luxe et les objets précieux. Sont également ciblés les actifs numériques et les fonds en assurance-vie qui ne sont pas orientés vers l’investissement productif, comme le précise l’exposé des motifs de l’amendement.
En contrepartie, les actifs immobiliers considérés comme « productifs », notamment les biens loués sur une longue durée et respectant certains critères environnementaux, seraient exclus de l’assiette. Le barème progressif de l’IFI serait remplacé par un taux unique fixé à 1%.
Une alliance politique hétéroclite pour un vote décisif
Ce qui rend ce vote particulièrement notable est l’alliance de circonstance qui l’a permis. Des députés du Rassemblement National, du Parti Socialiste, du MoDem et du groupe centriste Liot ont uni leurs voix pour faire adopter le texte.
Cette coalition hétéroclite a provoqué une fracture, y compris au sein de la gauche, où La France Insoumise a majoritairement voté contre. Un sous-amendement, proposé par le député PS Philippe Brun, a également été adopté. Il permet d’exclure de l’assiette un bien par foyer fiscal, avec un abattement pouvant atteindre un million d’euros.
Des réactions politiques aux antipodes
L’issue du vote a déclenché une vague de réactions très contrastées au sein de la classe politique. Pour Philippe Brun (PS), il s’agit d’un premier pas vers le « rétablissement de l’Impôt sur la fortune », supprimé en 2017 au profit de l’IFI.
À l’inverse, la députée Renaissance Prisca Thévenot a dénoncé une « taxe inventée par Marine Le Pen elle-même ». Le président de la commission des Finances, Éric Coquerel (LFI), a regretté un affaiblissement de l’IFI sans pour autant réinstaurer l’ISF. De son côté, le gouvernement, par la voix de l’entourage du Premier ministre Sébastien Lecornu, a rappelé son opposition à tout retour de l’Impôt de Solidarité sur la Fortune.
Que taxe exactement l’impôt sur la fortune improductive ?
Cet impôt cible les biens considérés comme ne contribuant pas à l’économie « productive ». Cela inclut les résidences secondaires non louées, les voitures de luxe, les yachts, les jets privés, les objets d’art, mais aussi les crypto-monnaies et certains contrats d’assurance-vie. Le taux d’imposition unique serait de 1%.
Pourquoi ce vote a-t-il créé la surprise à l’Assemblée nationale ?
La surprise vient de la coalition inédite qui a permis son adoption. Le fait que des partis aux idéologies opposées, comme le Rassemblement National et le Parti Socialiste, aient voté ensemble contre l’avis du gouvernement et d’une partie de la gauche a créé une situation politique rare et a mis la majorité relative en difficulté.
Est-ce un retour de l’ancien Impôt sur la Fortune (ISF) ?
Non, ce n’est pas un retour à l’identique de l’ISF. L’ISF taxait l’ensemble du patrimoine (immobilier, actions, placements financiers) au-delà d’un certain seuil. Le nouvel impôt se concentre uniquement sur les actifs jugés « improductifs », tout en excluant explicitement les actifs immobiliers loués et une partie de l’épargne productive.


